De manière simpliste, le processus est le suivant : quand les taux sont bas, les acteurs empruntent et achètent, faisant monter la valeur des actifs. Quand les banques centrales montent les taux, il ne se passe d’abord rien : tant que les acteurs ne se refinancent pas, ils n’ont pas d’impact direct de la hausse des taux. Donc il y a toujours un peu de retard entre le moment où les banques centrales ont remonté les taux et le moment où le système commence à freiner.
Malgré cela, c’est un jeu de chaise musicale : dans chaque secteur, les spécialistes savent que c’est la fin des vacances. Tant que c’est possible, personne ne bouge, il y a peu de transactions et on serre les fesses en attendant que ça passe. Mais généralement, il y en a un qui finit par céder, parce qu’il ne peut pas faire autrement. Et à partir de ce moment là, le mot d’ordre devient « courage, fuyons », chacun essayant de sortir avant le reste de la troupe.
Il y a eu un événement ces dernières semaines qui pourrait être ce catalyseur : la faillite de WeWork.
Beaucoup d’articles parlent de l’effondrement de la valeur du groupe, passée de $47 Mds à $0, ou des pertes du fonds de tech Softbank qui a investi $18 Mds dans WeWork qui doivent valoir quelques clopinettes aujourd’hui.
Mais on trouve d’autres articles qui s’inquiètent des conséquences sur le marché immobilier commercial. Celui-ci est déjà sévèrement impacté par l’impact du télétravail et la hausse des taux. Cela fait baisser significativement la valeur des actifs. Mais tant qu’il n’y a pas de transaction, cela ne se voit pas. Maintenant, avec l’entrée de WeWork en Chapter 11 (procédure de sauvegarde US), il va forcément y avoir des transactions. WeWork est un des premiers acteurs du marché de bureaux dans les grandes villes mondiales. A New York, WeWork a pour 640.000 m2 de baux de bureaux. Tout cela arrive sur le marché dans les semaines qui viennent, et va changer de propriétaire. Il y aura forcément des transactions, donc des prix. Et ces prix seront sans doute inférieurs aux valeurs conservées dans les comptes. Et en face de ces valeurs, il y a des dettes. Une partie importante de ces dettes vient des banques régionales américaines, qui sont déjà fragiles.
Je garde un œil sur cela et vous tiens au courant si ça dégénère dans les prochaines semaines. Ce scénario n’est en tout pas cas pas intégré dans les prix des actifs aujourd’hui (actions bien remontées, volatilité au plus bas et spread de crédit serrés). Toujours plus dangereux quand la prise de conscience est faible.